Le comportement de certains ambassadeurs en poste en Guinée ternit l’image de la fonction, heurte la conscience et pousse le commun des mortels à la colère et à l’indignation. A croire que ces messieurs sont à la solde non plus de leur pays et de leur ministère de tutelle mais du parti au pouvoir pour ne pas dire du petit Condé local. Cynisme, naïveté, incompétence ou tout simplement décrépitude du métier dans un monde ou tout fout le camp?
La diplomatie, croyait-on avec l’écrivain écossais, Eric Linklatter est « l’art de plonger dans des eaux troubles sans faire de « plouf ». » Seulement, ces messieurs-là font un tel plouf, que l’on est en droit de se demander d’où ils sortent : des dorures du Quai d’Orsay, des salons feutrés du Département d’Etat ? Ou simplement d’une compagnie de comiques troupiers ?
Pourquoi jusqu’ici avons-nous supporté la légendaire brutalité des grandes puissances ? La réponse est toute simple : parce qu’elles savaient y mettre les formes. Le tact, la discrétion, le charme intellectuel et physique de leurs diplomates arrivaient à nous faire oublier ne serait-ce que pour un moment ce qu’on appelle la raison d’Etat (en l’occurrence, la menace des bombes atomiques, les coups tordus des barbouzes et l’atroce souvenir des coups de fouet et des chaînes). Hélas, les mœurs se perdent même sous les lambris des vieilles Républiques. C’est vrai que De Gaulle et Kennedy ne sont plus de ce monde. C’est vrai que la dignité froide de Foster Dulles et de Couve de Murville nous ennuyait. Et voilà que la repoussante vulgarité de ces ambassadrions-là nous donne envie de vomir.
C’est l’ère de la médiocrité, compatriotes, le règne des petits copains et des petites combines ! Plus besoin d’y mettre les formes. Ces faux diplomates-là éructent, encensent le gouvernement, engueulent les opposants et se mêlent sans vergogne du faux débat ethnique que la cervelle malade des ethnologues ont imposé à notre peuple.
C’est le naufrage de notre Indépendance, c’est le retour des petits colons !
Un peu de tenue, un peu de respect, un peu de discrétion, Messieurs ! En vous écoutant et en vous regardant faire, me revient en tête, cet aphorisme lu ou entendu, je ne sais plus où (en Algérie, peut-être) : « Le sage cherche à comprendre, l’imbécile humilie. » Vous ne cherchez pas à comprendre, vous ne cherchez qu’à humilier.
A ce compte, les Guinéens, par votre faute, ne respecteront pas les nations que vous êtes censés représenter à plus forte raison vos misérables personnes.
Tierno Monénembo