fidhLa FIDH, l’OGDH et leurs partenaires publient aujourd’hui une note portant sur les projets de nouveaux codes pénal, civil, de procédure pénale et de justice militaire qui sont actuellement en cours de finalisation.

Vivement préoccupées par certaines dispositions envisagées, nos organisations appellent instamment le gouvernement à opérer des révisions, notamment celles relatives à la justice militaire, aux droits des femmes et à l’encadrement des manifestations, avant leur transmission prochaine à l’Assemblée Nationale.

L’évaluation de ces projets de codes par nos organisations révèle un bilan en demi-teinte. Alors que certains textes consacrent de grandes avancées en matières de libertés fondamentales et de respect des droits humains, d’autres marquent au contraire un recul, y compris parfois par rapport au droit existant.

« Les progrès enregistrés risquent d’être considérablement réduits dans leur portée, voire anéantis, si le gouvernement ne réagit pas à temps pour supprimer ou corriger certaines dispositions qui ne prennent pas en compte les conventions internationales et les engagements pris par le gouvernement guinéen », a déclaré Souhayr Belhassen, présidente d’honneur de la FIDH.

Le Code de justice militaire, plutôt que de cantonner la compétence de ces juridictions aux infractions purement militaires commises par des militaires, l’étend également aux infractions de droit commun. Dans certains cas, les civils pourront également être jugés par ces juridictions d’exception. Les dispositions qui consacrent une telle extension de compétence sont tout à fait contraires aux principes internationaux et aux recommandations des Nations unies et de la Commission africaine des droits de l’Homme et des Peuples, selon lesquelles les auteurs de graves violations des droits humains ne peuvent jamais être jugés par des tribunaux militaires.

« Le Code de justice militaire, s’il est voté en l’état, aurait pour conséquence de confier à des juridictions qui ne présentent pas de garanties d’indépendance et d’impartialité satisfaisantes la compétence pour juger les auteurs des crimes les plus graves et ce en violation des standards internationaux », a déclaré Me Frédéric Foromo Loua, président de MDT.

L’article 28 alinéa 2 du même projet de Code donne en effet également compétence à ces juridictions « pour connaître des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité, des crimes de génocide et des crimes d’agression commis par des militaires, tels que prévus par le Code pénal ». Cette compétence est tout à fait contraireà l’esprit du Statut de Rome et d’autant plus grave que la Cour pénale internationale est actuellement saisie de la situation en Guinée.

« Les crimes du 28 septembre pourraient être qualifiés de crimes contre l’humanité. Si le Code de justice militaire n’est pas révisé, nous courons le risque que les auteurs de ces crimes soient jugés par un tribunal militaire. Les victimes ne l’accepteront pas. », a déclaré Me Clémence Bectarte, coordinatrice du Groupe d’Action Judiciaire de la FIDH.

Par ailleurs, la transposition des textes internationaux relatifs à la protection des droits des femmes, et notamment au Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, est insuffisante et parcellaire. Si des avancées importantes sont consacrées, certaines dispositions marquent au contraire un recul, faisant de la législation relative aux droits des femmes un ensemble de règles incohérentes et difficilement applicables.

« Les dispositions relatives aux droits des femmes sont totalement contradictoires. Par exemple, le Code civil améliore par certains aspects la place de la femme au sein de la famille mais il légalise la polygamie. Le Code pénal autorise le recours à l’interruption volontaire de grossesse dans certains cas, mais le subordonne à l’autorisation d’un collège de médecins spécialistes, impossible à obtenir en pratique. Par ailleurs, contrairement aux engagements pris lors de son dernier examen périodique universel, le Code pénal ne propose pas de criminaliser le viol conjugal. », a déclaré Mme Moussa Yéro BAH, présidente de Femmes, Développement et Droits Humains (F2DHG).

Enfin, les dispositions relatives à l’encadrement des manifestations pourraient, en raison de leur imprécision et de leurs incohérences, porter atteinte au droit de manifestation garanti par l’article 10 de la Constitution et être aisément utilisées à des fins de rétorsion politique.

« Le risque est grand que les dispositions du Code pénal puisse être utilisées à des fins politiques. Celui-ci doit être révisé de manière à garantir le droit de tous à manifester pacifiquement et être suffisamment précis pour que seuls les auteurs de violence contre les personnes ou les biens puissent être individuellement poursuivis », a déclaré Abdoul Gadiry Diallo, président de l’OGDH.

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Source FIDH