map_1st_roundLa plus grande décharge de déchets solides de la capitale guinéenne située dans le quartier de Dares-salam, dans la commune de Ratoma, permet à de nombreuses femmes démunies de trouver leur pitance quotidienne. Ces femmes accourent sur cette décharge, communément appelée "décharge de la Minière", qui a pris la forme de collines éparses, suite à l'amoncellement des ordures, dès l'aube à la recherche du moindre objet susceptible d'intéresser les acheteurs de camelote.

C'est le cas de Maimouna Sow à peine la trentaine et mère de 2 enfants. Son récit est hallucinant : "Je vis grâce à cette activité de recyclage de déchets que j'exerce sur cette décharge tous les jours. Car je n'ai en fait pas le choix", ajoute-elle.

Notre interlocutrice dit être une femme au foyer, mais dont l'époux ne subvient pas aux besoins, étant au chômage.

"Je ramasse des bouteilles vides en verre ou en plastique, des cartons vides, que je revends ensuite aux vendeuses d'huile, pour ce qui est des bouteilles.?Les cartons eux, ce sont les vendeuses de poissons qui les achètent. Les prix varient en fonction de l'état de l'objet ramassé. Il arrive que je gagne par jour 10 à 15 mille francs guinéens, soit environ 1, 5 euro. Mais dès fois, juste de quoi acheter une miche de pain pour mes enfants, pour environ 0, 2 euro.

Certaines mères de famille viennent à la décharge en compagnie de leur progéniture. Comme Cissé Salemata, une quadragénaire de forte corpulence. Avec ses enfants Ousmane et Ahmed, âgés respectivement de 13 et 10 ans, elle fouille, creuse parfois à l'aide d'une daba à la main, pour extraire tout ce qui lui passe sous la main.

"Je viens avec mes enfants, que j'ai du mal à nourrir, seule, étant veuve depuis trois ans. Ils m'aident à brûler les pneus pour en tirer les fils de fer, que nous revendons aux femmes ménagères".

Ces fils de fer extraits des pneus usagers servent à faire l'économie du charbon de bois utilisé dans la cuisine dans ce pays où le gaz entre peu dans la cuisson des aliments dans les ménages.

Cissé Salemata procède également au recyclage des boites de conserves, dont le kilogramme est vendu à l'équivalent de 0,5 euro. La pesée se fait directement sur les lieux de vente que sont les marchés environnants.

Le fruit de son gain sert à assurer les besoins des siens, y compris la scolarité des enfants, qui fréquentent une école publique de la commune.

Sur cette décharge, des sachets d'eau en plastique, des objets en fer, de vielles chaussures, des habits, rien n'échappe à la vigilance de ces chasseurs de trésor d'une autre catégorie. Des indigents à la recherche de quoi se mettre sous la dent, dans un contexte marqué par la cherté de vie.

Les populations riveraines de la décharge regardent tout ce spectacle avec "indignation et impuissance" face à des autorités qui selon elles, trainent les pieds dans la fermeture de cette décharge qui doit être déménagée pour Kagbélen, quartier situé à une trentaine de kilomètres du centre ville. En vue d'éviter que les mauvaises odeurs et la pollution qui se dégagent des déchets déversés quotidiennement par les camions bennes du Service public de transfert des déchets (SPTD), rattaché au gouvernorat de Conakry, n'affectent la santé des riverains.

B. Alpha qui vit en face de la décharge ne cache pas son amertume. "C'est très difficile de vivre en cohabitation avec les ordures. A cause de la fumée qui se dégage des lieux ainsi que des odeurs pestilentielles. Cela nous empêche même de dormir, une fois la nuit tombée", fulmine notre interlocuteur.

Quant aux activités de recyclage de déchets que certains citoyens exercent sur la décharge, notamment les femmes, il met cela au compte de la paupérisation des populations, de façon générale. Il appelle les autorités du pays à contribuer à l'amélioration du sort des populations.

Certes, le gouvernement guinéen a inscrit parmi ses priorités la promotion des activités des femmes et des jeunes, depuis l'avènement du président Condé aux affaires en décembre 2010. Mais le chemin reste long pour assurer la prospérité à toutes ces populations.

C'est dans cette optique que se situe la création de l'Agence nationale de la micro-finance (ANAMIF), qui a été suivie de la mise à disposition d'un Fonds national de solidarité en faveur des jeunes et des femmes.?Fonds portant sur 13 millions d'euros.

Mais ce projet dont la mise en œuvre doit passer par les institutions de micro-finance de la place peine à produire les résultats escomptés. Le gouvernement guinéen ayant pris la mesure de la situation promet d'huiler davantage le mécanisme, comme l'a indiqué ce samedi à l'occasion de la célébration de la fête des femmes, le Premier ministre Mohamed Saïd Fofana.

En attendant que les projets et autres initiatives de toutes les femmes de Guinée soit prise en compte par les gouvernants, les femmes qui se débrouillent sur la décharge de la Minière, vont y demeurer. Conjoncture oblige, avec les risques encourus par ces pauvres femmes, liés à des questions de santé publique.

Pour ce qui est du déménagement de la dite décharge, Konaté Siaka, chargé de la collecte des ordures au niveau du Service public de transfert des déchets (SPTD), interrogé par un reporter de Xinhua, a indiqué que des préalables demeurent pour fermer cette décharge, et que le projet devait voir le jour depuis 2005. Il faut une entreprise dotée d'une bonne expertise en la matière pour faire déménager une telle décharge. Il n'a pas manqué de relever le fait que cela nécessite d'énormes moyens financiers.

Il conviendrait de noter que la capitale dont la population frôle le seuil de deux millions d'habitants produit près de 1000 tonnes d'ordures par jour. Des déchets qui ne prennent pas tous le chemin de la décharge de la Minière, à cause de l'anarchie qui a entoure la gestion des déchets dans la capitale.

Source : http://french.cri.cn/